08 juillet 2016

QUINZE VAGUES DE DÉMOLITIONS DEPUIS 2005 Le cas de Khirbet Tana

Palestine  -DOSSIER DÉMOLITIONS - pages 6

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par Simona Abderhalden et Camilla Corradin (EWASH)
d'après leur article "Palestine: when demolitions and restrictions hinder access 10 waler"


Dans le village de Khirbet Tana, en Cisjordanie, Radwan Khatatbeh et sa famille habitent une cave depuis que leur maison a été démolie en février passé -en tout, pour la 5e fois.

"Chaque fois que l'armée israélienne vient exécuter un ordre de démolition dans notre communauté, je leur dis que j'ai vécu ici toute ma vie, depuis 80 ans. J'étais ici avant l'occupation. Ceci est ma terre, ceci est chez moi", déclare Radwan, né à Khirbet Tana en 1936. Plusieurs générations d'éleveurs ont ainsi vécu ici, depuis plus de cent ans. Leurs ancêtres ont choisi de s'installer à Khirbet Tana pour l'eau et le pâturage, essentiels pour leur bétail, leur principale -voire leur seule- source de revenu, Près de 40 foyers y vivent aujourd'hui.

Parce que situé non seulement en zone C, mais également près d'une zone de tir, le village a déjà subi quinze vagues de démolitions depuis 2005, cette année, la communauté villageoise a eu droit à quatre vagues de démolitions en l'espace de deux mois (entre février et avril passés): en tout 151 structures totalement détruites, se traduisant par 217 personnes déplacées, Rien n'a été épargné par l'armée-ni l'école primaire (construite en 2011 pour remplacer celle en béton qui avait également été détruite), ni l'infrastructure d'eau et d'assainissement (latrines, citernes d'eau, mais aussi la piscine en béton qui venait juste d'être construite), C'est principalement l'Union européenne qui avait financé la construction de ces structures, en tant qu'intervention humanitaire pour pallier aux vagues de destructions précédentes.

Tandis que onze des enfants de Radwan se sont mariés et ont déménagé près de Beit Furik, une ville non loin de là, son fils Mohammad est déterminé à rester dans le village. Il habite encore avec ses parents mais se marie bientôt lui aussi. Il est conscient que son choix de rester à Khirbet Tana ne leur rendra pas la vie facile, constamment menacée du fait des infrastructures limitées et par le risque de démolitions, Le village n'a pas d'électricité par exemple, juste des panneaux solaires, utilisés pour recharger des téléphones et des lampes de poche. Le système de permis israélien a également empêché que l'infrastructure d'eau et d'assainissement ne soit correctement développée, Le tuyau approvisionnant le village en eau n'est pas assez important pour satisfaire les besoins de tout le village. Une bonne moitié des familles situées tout au bout du tuyau ne reçoit pas assez d'eau et se voit obligée d'aller chercher l'eau à la source, à 1 km et demi du village. Idem pour ceux qui ne sont pas du tout connectés au réseau, qui eux font le chemin au moins deux fois par jour.

Elaf, la femme de Radwan, témoigne: "les tâches domestiques du quotidien, par exemple faire la vaisselle ou la lessive, deviennent extrêmement difficiles et fastidieuses dans de telles conditions. Nous gardons notre consommation en eau à un minimum pour survivre. On estime la consommation moyenne d'un habitant de Khirbet Tana à 35 litre par jour, bien en dessous du standard minimum de 100 litres de l'OMS. Alors que les colonies illégales à proximité du village prospèrent et sont totalement équipées, les communautés bédouines et d'éleveurs de Cisjordanie peinent à jouir de leurs droits fondamentaux. Leurs terres sont confisquées, leur accès à l'eau et à l'assainissement sévèrement restreint, leurs familles n'ont pas le droit de vivre une vie digne.

"Cette situation est terriblement frustrante et humiliante, résume un autre éleveur du village. "Ceci est notre terre. On devrait être libres d'y construire et d'y développer les infrastructures dont on a besoin. Mais on ne peut pas. Par contre, un colon qui viendrait s'installer au sommet d'une de nos collines, le lendemain, il serait immédiatement approvisionné en eau, électricité. il obtiendrait la protection de l'armée israélienne. Et nous -les propriétaires de cette terre!- nous n'avons rien. Nous n'avons même pas le droit d'avoir des citernes et des latrines."

Traduction de l'anglais (original) par l'ABP

POUR EN SAVOIR PLUS
Les derniers chiffres de la Commission européenne évaluant le montant des dégâts causés aux projets financés par l'UE : http://www.europarl.europa.eu/sides/getAIIAnswers.do?reference = E- 2016-002415&language=EN

Bulletin de l'association belgo-palestinienne / Wallonie-Bruxelles ASBL - ABP - N° 68, Avril - mai - juin  2016. Dossier démolitions, version 2016

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