De nombreux États et élites en Occident ont consenti, de manière active ou passive, à la dévastation de la bande de Gaza et au massacre de sa population par Israël. Pour parvenir à ce constat, l'anthropologue Didier Fassin s'est plongé dans l'analyse des événements qui ont ébranlé la région de Palestine depuis les attaques du Hamas le 7 octobre 2023. Professeur d'éthique au Collège de France (où il est titulaire de la chaire "Questions morales et enjeux politiques dans les sociétés contemporaines") et à l'université de Princeton, il vient de publier {Une étrange défaite. Sur le consentement à l'écrasement de Gaza.} 2024.
Avec le recul du temps, les événements qui, après l'attaque meurtrière du Hamas le 7 octobre 2023, se sont déroulés en Palestine et leur réception dans une grande partie des lieux de pouvoir, tant politiques qu'intellectuels, de la planète apparaîtront à la lumière crue de leur signification : plus que l'abandon d'une partie de l'humanité, dont la réalpolitique internationale a donné maints exemples récents, c'est le soutien apporté à sa destruction que retiendra l'histoire.
Cet acquiescement à la dévastation de Gaza et au massacre de sa population par l'État d'Israël, à quoi s'ajoute la persécution des habitants de Cisjordanie, a suscité l'indignation de celles et ceux qui, tout en condamnant les actes sanglants ayant déclenché l'offensive, rappelaient les décennies de spoliation, de violence et d'humiliation qui les avait précédés et refusaient la poursuite de l'écrasement d'un peuple et de l'effacement de sa mémoire. Mais on les a stigmatisés et réprimés. Une police de la pensée s'est imposée. Le détournement des mots et l'inversion des valeurs ont mis à l'épreuve l'intelligence politique et le discernement moral. Ce livre propose une archive et une analyse de cette abdication historique.
Version papier : 17.00 € - Version numérique : 11.99 € (La Découverte),
Un ouvrage où Didier Fassin interroge les interprétations auxquelles ce conflit a donné lieu. Tout en gardant à l'esprit cette question qui sous-tend l'essentiel de ses travaux : une vie en vaut-elle une autre ?
Lire les premières pages du livre :
______________Qui est Didier FASSIN ?
https://fr.wikipedia.org/wiki/Didier_Fassin
Didier
Fassin, né le 30 août 1955, est un anthropologue, sociologue et médecin
français. Il est professeur au Collège de France sur la chaire
« Questions morales et enjeux politiques dans les sociétés
contemporaines » et professeur de sciences sociales à l'Institute for
Advanced Study de Princeton. Il occupe également une direction d’études à
l'École des hautes études en sciences sociales. Il a été élu à
l’Académie de l’Europe en 2021 et à l’American Philosophical Society en
2022.
(...)
C’est au Sénégal, dans le cadre d’un programme de
l’Institut de recherche pour le développement qu’il conduit de 1984 à
1986 sa première étude anthropologique, qui porte sur les relations
entre thérapeutes et malades en milieu urbain et dont il tire la matière
de sa thèse de doctorat3. En 1989, il part en Équateur à l’Institut
français d’études andines pour y étudier avec la sociologue Anne-Claire
Defossez, les processus rendant compte des disparités de mortalité
maternelle et de santé reproductive, notamment parmi les populations
indiennes4. À partir de l’année 2000, il dirige un programme sur les
enjeux politiques, historiques et mémoriels du sida en Afrique du Sud,
pays du monde le plus touché par l’épidémie.
Parallèlement, il
s’intéresse de manière croissante aux questions morales et politiques
posées par la prise en charge de personnes confrontées à des situations
de précarité ou de domination : pauvres, chômeurs, migrants, réfugiés,
orphelins du sida en Afrique, victimes de catastrophe au Venezuela,
populations opprimées en Palestine5. S’appuyant sur de longues enquêtes
de terrain – quinze mois avec des brigades anticriminalité et quatre ans
dans une maison d’arrêt – ses recherches portent, d’un côté, sur le
développement de logiques compassionnelles et de pratiques humanitaires,
de l’autre, sur le déploiement de politiques répressives à travers la
police, la justice et la prison.
——
Docteur Honoris causa à l’Université de Liège en 2021
Crédit photo : Collège de France/Patrick Imbert
Extrait de la présentation :
”Qu’il
s’agisse de la lutte contre le sida, de la gestion des demandeurs
d’asile, des contrôles policiers dans les banlieues parisiennes, ou
encore de la prison, tous relèvent d’une même problématisation au sens
de Michel Foucault, celle du gouvernement de catégories de personnes
souvent vues comme « indésirables ». Pour analyser ces différentes
politiques, Didier Fassin prend à chaque fois appui sur de longues
enquêtes ethnographiques, qui visent à saisir le point de vue des
différents acteurs en présence à partir de leurs pratiques et discours
au quotidien, et une approche critique, qui resitue ces pratiques et
discours dans les rapports de pouvoir auxquels ils participent. Au
croisement de l’anthropologie et de la sociologie, les travaux de Didier
Fassin ont en commun de porter une attention particulière au corps, aux
affects, à la morale, aux inégalités face à la vie, et à l’histoire.
(…)
Dans
chacun de ses ouvrages, Didier Fassin discute des analyses qui sont
proposées de ces problèmes par les politiques, les journalistes et les
intellectuels dans les médias à partir d’une analyse des chiffres à
disposition, du discours des acteurs et d’une description fine des
interactions sur le terrain. Ce faisant, son ambition n’est ni dénoncer
une situation, ni de formuler des recommandations, mais bien d’apporter
un éclairage empirique, c’est-à-dire à la fois compréhensif, critique et
historique. C’est pour lui la meilleure contribution que les sciences
sociales peuvent apporter aux enjeux de notre monde contemporain.
En
décernant cette distinction au professeur Didier Fassin, la Faculté des
Sciences Sociales de l’Université de Liège souhaite mettre en exergue la
contribution de ses travaux à l’étude des politiques publiques en
matière de santé et de sécurité et, de manière plus générale, à la
compréhension des inégalités sociales face à la vie. Fondées sur des
recherches de longue durée, ces travaux apportent un éclairage critique
qui est essentiel pour penser ces enjeux au cœur de notre monde
contemporain.
----
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire