Philippe Paquet; La Libre Belgique
Envoyé spécial à New York
Mis en ligne le 24/09/2010
Dans un discours essentiellement consacré au Proche-Orient, Obama a plaidé jeudi pour l’admission d’un Etat palestinien indépendant l’an prochain. Un engagement personnel qui pèsera sur ses chances de réélection en 2012.
Barack Obama a donné rendez-vous avec l’Histoire jeudi, devant l’Assemblée générale des Nations unies, en formant le vœu que l’Onu puisse accueillir, l’an prochain, un nouveau membre : "un Etat de Palestine indépendant". Si l’occasion n’est pas saisie maintenant, alors que de laborieuses négociations sous le patronage des Etats-Unis viennent de reprendre entre Israéliens et Palestiniens, a-t-il prévenu, le risque sera grand de devoir attendre que passe une génération pour ramener la paix au Proche-Orient. Si le président américain a été alors longuement applaudi par l’assemblée et si les bancs de la délégation israélienne dans la salle n’étaient vides que pour cause de fête religieuse juive, on ne pouvait s’empêcher de penser que le pari est loin d’être gagné.
A quelques semaines d’élections cruciales pour sa majorité au Congrès, M. Obama a dressé un bilan de ses réalisations en politique étrangère : le sauvetage de l’économie mondiale après la crise financière de 2008, le retrait d’Irak, la stabilisation en Afghanistan, les progrès enregistrés dans l’élimination des armes nucléaires, le bâton et la carotte à l’égard de l’Iran, l’aide apportée à Haïti et au Pakistan Mais c’est de ce qu’il reste à accomplir qu’il a voulu surtout parler, consacrant au conflit israélo-palestinien des développements qu’on n’avait plus entendus depuis longtemps dans la bouche d’un président américain à l’Onu.
"Les cyniques disent que les deux parties sont trop méfiantes l’une envers l’autre et que les divisions intestines sont trop grandes dans chaque camp pour qu’on puisse forger une paix durable", a admis Barack Obama. Il n’en a pas moins exhorté les protagonistes à puiser dans les traditions de tolérance des "trois religions qui considèrent le sol de Jérusalem comme sacré" (le judaïsme, le christianisme et l’islam) pour qu’enfin les choses progressent. Car, à défaut d’accord, "les Palestiniens ne connaîtront jamais la fierté et la dignité que confère un Etat". Et "les Israéliens ne connaîtront jamais la certitude et la sécurité que vous donnent des voisins souverains et stables qui se sont engagés à vivre ensemble". "Le sang continuera de couler", a averti le Président. "La Terre sainte demeurera le symbole de nos différences, plutôt que celui de notre commune humanité."
M. Obama a mis le Premier ministre israélien, Benjamin Netanyahou, et le président de l’Autorité palestinienne, Mahmoud Abbas, au pied du mur en épinglant leur engagement mutuel à mener les négociations à leur terme. Mais il a appelé tous les autres acteurs et le reste de la communauté internationale à soutenir le processus. "Nombreux dans cette salle sont ceux qui se rangent parmi les amis des Palestiniens. Mais les paroles doivent maintenant être suivies par des actes", a insisté le chef de l’exécutif américain. "Ceux qui se sont engagés sur l’Initiative arabe de paix doivent saisir cette occasion [ ] pour avancer comme promis sur la voie de la normalisation avec Israël. Et ceux qui parlent haut et fort en faveur de l’autonomie palestinienne doivent apporter un soutien politique et financier à l’Autorité palestinienne."
Barack Obama a pris soin de rappeler le soutien indéfectible des Etats-Unis à Israël. "Après soixante ans de présence au sein de la communauté des nations, l’existence d’Israël n’est pas un sujet de discussion", a-t-il martelé. "Israël est un Etat souverain et la patrie historique du peuple juif. Il doit être clair pour tous que toute tentative d’attenter à la légitimité d’Israël ne pourrait que se heurter à l’opposition résolue des Etats-Unis." Et de souligner que "le massacre d’Israéliens innocents n’est pas de la résistance, mais de l’injustice".
Dans le même temps, le président américain n’en a pas moins souligné que les amis d’Israël doivent réaliser que "la sécurité véritable de l’Etat hébreu passe par la création d’une Palestine indépendante - un Etat qui permette aux Palestiniens de vivre dans la dignité et de jouir d’opportunités". M. Obama a rappelé la position de son gouvernement sur les colonies juives. Le moratoire sur leur construction a "amélioré la situation sur le terrain et le climat des négociations", et il doit par conséquent pouvoir être prolongé, un point sur lequel, pourtant, M. Netanyahou est resté évasif jusqu’ici en n’envisageant que le gel éventuel de certains projets.
Le conflit israélo-palestinien, a conclu le président américain, est presque aussi ancien que l’Organisation des Nations unies elle-même. "Nous pouvons nous revoir l’an prochain et tenir le même genre de discours". Ou "nous pourrions avoir un accord qui nous conduirait à accueillir un nouveau membre des Nations unies : un Etat de Palestine indépendant, vivant en paix avec Israël".
Dans cette hypothèse, Barack Obama rejoindrait Jimmy Carter au rang des grands artisans de la paix au Proche-Orient. Il mériterait alors pleinement le prix Nobel qui lui fut décerné anticipativement après son entrée en fonction. Dans le cas contraire, l’échec de cet engagement personnel pourrait peser lourdement sur ses chances de réélection en 2012.
Un Blog centré sur la Palestine, complément du site et du Blog de L'ARC EN CIEL.
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